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Publié le par Alluvions

23/10/2007 - "Nos inquiétudes sur le front des maladies rares" : l'AFM interpelle les députés et sénateurs

             NOS INQUIETUDES SUR LE FRONT DES MALADIES RARES

> Première inquiétude : Quelles seront les conséquences pour nos malades de la remise en cause des principes fondamentaux de notre système de santé ?

Nous en sommes tous d’accord : notre système de santé doit faire face à des dépenses croissantes et légitimes liées aux innovations thérapeutiques, au vieillissement de la population ainsi qu’à l’apparition de nouveaux besoins. Et pour cela, en effet, des réformes doivent être faites.

Mais, avant tout débat sur cette question de fond, le gouvernement nous propose de combattre ces fléaux que sont la maladie d’Alzheimer et le cancer, par le biais de nouvelles franchises. Avec tous ceux qui souffrent d’une affection longue durée, nous représentons plus de 60% des dépenses de santé de ce pays. Et, avec l’instauration de ces franchises, c’est nous qui allons, chaque année, devoir payer 50 euros supplémentaires pour nous soigner et gagner du temps sur l’issue fatale. 50 euros vite atteints car nous avons besoin, plusieurs fois par semaine, des soins d’un kinésithérapeute ou d’autres paramédicaux, nous suivons des traitements médicamenteux et devons nous rendre dans des consultations spécialisées loin de notre domicile. 50 euros qui vont s’ajouter aux 50 euros des franchises médicales déjà existantes.

Pour des familles déjà fortement fragilisées par la maladie, cette mesure est incompréhensible. Comment pouvons-nous comprendre qu’il nous faille, à nous, malades au long cours, assumer le financement des plans Alzheimer, cancer et soins palliatifs ? Comment une personne atteinte de myopathie peut-elle accepter d’être moins remboursée sur ses soins en kinésithérapie car il y aurait des priorités de santé plus importantes que la sienne ?

Cette réforme ne résout pas le problème de fond du financement de notre système de santé. Elle rompt fondamentalement avec le contrat social français qui s'est construit sur la mobilisation de multiples solidarités. Celle des riches avec les moins riches, mais aussi celle des jeunes avec les plus âgés, des célibataires avec les familles, des bien portants avec les malades. C'est sur la diversité de ces solidarités que repose la cohésion de notre système de protection sociale et seul un système basé sur une très large solidarité pourra permettre de maintenir l'accès pour tous à des soins de qualité et à de futurs traitements.

Pour protéger cette solidarité entre malades et bien portants, il existe pourtant des solutions : des voies d'optimisation (organisation du système hospitalier, modalités de rémunération des professionnels de santé, liberté d'installation, organisation de véritables parcours de soins…) et de nouvelles ressources à mobiliser comme l’a indiqué le dernier rapport de la Cour des Comptes.

> Deuxième inquiétude : N’assistons-nous pas au désengagement des pouvoirs publics dans la recherche concernant les maladies rares ?

Après 20 ans de combat pour sortir de l’ignorance, de l’abstention thérapeutique et de l’absence de recherche, nous avons enfin obtenu, en 2004, la reconnaissance des maladies rares comme priorité de santé publique et un plan national a été lancé pour 4 ans. Il a permis la mise en réseau de la recherche fondamentale et la création, dans toute la France, de centres de référence pour une meilleure prise en charge des malades. Que va-t-il advenir de ce plan après 2008 ? Comment les spécificités des maladies rares pourront-elles être inscrites de façon durable dans notre système de santé et de recherche ? Déjà, les premières avancées sont menacées ! En effet, dans le cadre des prochains appels d’offres de l’Agence nationale de la recherche (ANR), la recherche sur les maladies rares se trouve absorbée dans un appel d’offres concernant les mécanismes physiopathologiques des maladies rares et… des maladies fréquentes. Dans le même temps, le financement du Programme Hospitalier de Recherche Clinique dédié aux maladies rares est diminué de moitié : en 2008, il reviendra ainsi à un niveau inférieur aux années précédant le plan maladies rares. Nous ne pouvons pas accepter ce retour en arrière. La dilution de la problématique des maladies rares dans une problématique plus globale aboutira à la disparition de la recherche dans ce domaine. Nous le savons parce que nous avons eu par le passé moult exemples de cet état de fait.

Aujourd’hui, nous abordons le grand virage des traitements et des essais démarrent partout dans le monde pour les maladies rares. Nous en soutenons une trentaine pour 25 maladies différentes. Nombre de ces essais concernent les biothérapies (thérapie génique, thérapie cellulaire), des thérapies innovantes dont on sait qu’elles bénéficieront aussi aux maladies plus fréquentes, comme c’est déjà le cas par exemple pour l‘infarctus du myocarde ou certaines maladies neurologiques. C’est un enjeu majeur de la médecine de demain. La recherche sur les maladies rares sert l’intérêt général. La faire disparaître dans un pot commun où elle se diluera inéluctablement, renverra les millions de malades concernés dans le no man’s land dont nous avons mis tant d’années à sortir. Au contraire, la présidence européenne du second semestre 2008 offre une occasion historique de faire rayonner notre politique nationale novatrice dans ce domaine en accélérant le développement de la recherche thérapeutique et l’amélioration de la prise en charge médicale des 30 millions d’Européens concernés, à l’image de ce qui était souvent, jusqu’alors, qualifié de « French Model ».

> Troisième inquiétude : un droit à compensation au rabais pour nos enfants ?

L’article 13 de la loi du 11 février 2005 prévoyait : « Dans les trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, la prestation de compensation sera étendue aux enfants handicapés ». Ayant vivement regretté que la prestation de compensation (PCH) ne soit pas appliquée à nos enfants dès 2005, c’est avec impatience que nous attendions son ouverture. Auditionnés par l’IGAS en décembre 2006, nous nous attendions à poursuivre le débat. Quelle surprise de découvrir, dans le PLFSS 2008, un bref article sur ce sujet ? L’introduction de cet article, sans aucune concertation, rompt brutalement avec le travail collaboratif qui, jusqu’à présent, avait entouré l’élaboration et la mise en œuvre de la loi du 11 février 2005.

Inquiétude donc sur la méthode mais inquiétude aussi sur le contenu de cet article qui ne permet pas en l’état actuel d’assurer à nos enfants une prestation de compensation immédiate et aussi complète que pour les adultes. Les dispositions relatives aux critères d’accès ainsi qu’au montant des prestations doivent sans réserve s’appliquer aux enfants au plus tard le 12 février 2008. Il nous apparaît inutile et dangereux de prévoir des décrets qui conduiraient à moduler l’application de la PCH pour les enfants. La seule exception à ce principe, pour lequel nous souhaitons un amendement au projet de loi, est liée à la capacité juridique des enfants mineurs. Nous demandons que la loi prévoie explicitement qu’un décret fixe, dans les situations de grande dépendance, les modalités d’application pour les mineurs de dispositions permettant de rémunérer un parent. Bien entendu, nous ne demandons pas qu’un mineur puisse salarier son parent, mais qu’un montant financier comparable puisse reconnaître le travail fourni par les parents que l’enfant soit à la veille ou au lendemain de ses 18 ans (comme cela est prévu pour les PCH adultes).

Par ailleurs, nous estimons nécessaire qu’un réel débat ait lieu sur l’identification de la part de l’AEEH qui jusqu’à présent correspondait à une prestation familiale spécifique et non pas à la compensation du handicap de l’enfant. Ce débat doit avoir lieu et la modulation de cette part « prestation familiale » doit être explorée. Nous demandons que le gouvernement s’engage clairement en ce sens. Dans cette attente, la possibilité de pouvoir cumuler l’AEEH de base avec la PCH est un minimum pour les familles.

NB : Ce texte accompagne un courrier signé de la présidente de l'AFM, Laurence Tiennot-Herment, et adressé le 22 octore 2007 à l'ensemble des députés et sénateurs.
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